« Héritage et Innovation »

« Ce qui est au-dessus de la forme s’appelle le Dao ; ce qui est dans la forme s’appelle l’artefact. » La céramique chinoise incarne depuis des millénaires cette fusion entre le spirituel et le matériel, à travers l’héritage et l’innovation.

En 2026, le congrès de l’AIC se tiendra pour la première fois à Jingdezhen, berceau emblématique et universellement reconnu de la porcelaine. Ce choix est hautement symbolique, car Jingdezhen incarne le thème « Héritage et innovation » en combinant patrimoine ancestral et désir d’innovation, comme une dynamique sans cesse renouvelée reliant le passé et l’avenir.

Le seul héritage est celui qui a survécu. Car si l’héritage semble structuré autour de la répétition, qui conduit à la perfection, il peut aussi conduire à l’ennui lorsqu’il perd l’énergie qui l’a fait naître. Un héritage qui a survécu est donc un héritage qui a su nourrir cette répétition pour que ses valeurs puissent continuer à s’incarner, mais qui a aussi permis d’intégrer des changements pour répondre aux besoins fondamentaux de l’être humain. Nous sommes permanence et transformation, et la pratique de la céramique se nourrit de cette apparente contradiction.

Le développement d’un thème pour un congrès de l’AIC doit intégrer à la fois des aspects locaux et globaux. Ce sera le cas à Jingdezhen en 2026. Le thème choisi par l’hôte et approuvé par l’AIC est aussi large qu’on pourrait le souhaiter et pourrait comporter de nombreux chapitres. Les conférences étant limitées par le temps disponible lors du congrès, quatre chapitres ont été définis et seront développés pendant le congrès :

• Perspectives historiques
• Dialogue mondial, pratiques locales
• Développement durable et responsabilité écologique
• L’avenir : entre artisanat, technologie et science

Nous espérons apporter à notre domaine une perspective qui peut se résumer poétiquement ainsi : enracinement et envol.

• I. Perspectives historiques : un patrimoine vivant

De la poterie néolithique aux céladons philosophiques de la dynastie Song et à la légendaire porcelaine bleue et blanche, la céramique chinoise est à la fois un art, une science et le langage de la civilisation. Jingdezhen, creuset de cette histoire, a développé une esthétique unique : blancheur, finesse, résonance et brillance. Grâce à un système de production sophistiqué – jusqu’à 72 étapes pour réaliser un vase –, elle incarne le lien entre héritage et innovation.

Ce chapitre historique explorera comment ce patrimoine millénaire peut être revitalisé aujourd’hui, tant en Chine que dans le monde entier. Car la céramique chinoise n’est pas seulement un trésor national : c’est un patrimoine commun de l’humanité, incarnant une sagesse qu’il est urgent de faire revivre.

• II. Dialogue mondial, pratiques locales

La porcelaine de Jingdezhen est exportée depuis des siècles via les routes de la soie, influençant les modes de vie en Europe comme en Asie. L’échange n’était pas à sens unique : le bleu cobalt venait du Moyen-Orient, et la vogue de la chinoiserie en Occident témoigne d’une circulation dynamique des savoirs.

Aujourd’hui, cette vocation mondiale se poursuit : Jingdezhen est un lieu d’échange où des artistes internationaux s’interrogent sur la céramique contemporaine. Ce chapitre explore les intersections entre les techniques, les inspirations et les contextes culturels dans des domaines tels que l’architecture et le design.

La contribution des résidences d’artistes à ce domaine sera également abordée, car ces lieux et ces moments favorisent la collaboration et l’expérimentation, offrant un terrain fertile pour réfléchir à la diversité comme source de richesse, dans l’esprit de Claude Lévi-Strauss.

• II. Développement durable, responsabilité écologique : vers un avenir responsable ?

Alors que le monde est confronté à des défis écologiques urgents, nous ouvrons ce chapitre en explorant les possibilités d’applications innovantes des matériaux traditionnels dans la pratique contemporaine et les pratiques durables dans le domaine du design. Nous abordons également ici la question de la jeunesse et de la responsabilité des établissements d’enseignement. À cet égard, nous examinerons les tendances mondiales en matière d’enseignement de la céramique, les pratiques d’intégration entre l’industrie, l’enseignement supérieur et la recherche, ainsi que les questions de créativité chez les jeunes et d’incubation d’entreprises.

• IV. L’avenir : entre artisanat, technologie et science, la place de la main, des machines et de l’intelligence artificielle

Un outil est déjà un langage. L’avenir de la céramique ne peut se passer d’un dialogue sur les valeurs, qu’elles soient ancrées dans l’artisanat ou issues d’innovations technologiques. La main de l’artiste, avec sa chaleur et son intuition, reste irremplaçable. Mais les technologies émergentes – impression 3D, CNC, intelligence artificielle, où l’IA et les robots conduisent au remplacement de l’intelligence et du travail humains, vers une civilisation purement numérique – élargissent le champ des possibles. Ce chapitre sur l’avenir s’interrogera sur ces croisements : comment préserver les aspects spirituels et matériels de l’art tout en explorant de nouveaux outils ? Au-delà des techniques, c’est l’identité même de la création céramique qui est en jeu.

En Chine, il s’agit de passer du « Made in China » au « Created in China », affirmant ainsi une présence mondiale qui reste ancrée dans les cultures locales. Forte de sa riche histoire, la Chine peut jouer un rôle de premier plan dans la redéfinition du paysage international de la céramique, que ce soit à travers les valeurs de l’artisanat et des savoir-faire traditionnels, l’intégration des outils de l’intelligence artificielle dans la création, les changements industriels dans les méthodes de production ou les nouvelles formes de communication dans le domaine de la céramique.

• Conclusion : la céramique, un art en perpétuelle renaissance depuis la nuit des temps !

Faisons de l’argile notre langage et du feu notre musique. Contre le bruit du monde, en unissant nos voix, nous pouvons ouvrir un nouveau chapitre de l’art céramique mondial, fondé sur l’échange, la diversité, la création individuelle et collective, sans oublier notre responsabilité envers l’avenir. Dans chaque four qui brûle, n’est-ce pas le potentiel d’un monde réinventé qui s’enflamme ?

En 2026, sous les lumières de Jingdezhen, le congrès de l’AIC sera à la fois une célébration du passé et une invitation à se tourner vers l’avenir. Que vous soyez artiste, artisan, chercheur, designer ou amateur, cet événement sera l’occasion de réfléchir ensemble à la place de la céramique dans le monde d’aujourd’hui.